Une promenade sous-marine en survolant une canopée de Gorgones géantes, c’est l'assurance d'entrer de plain-pied dans un monde onirique. À quelques encablures de l'île de Porquerolles sur sa face sauvage existe, sous plusieurs mètres d'eau, un monde ignoré des terriens, mais bien connu des aquanautes. Ce monde englouti recèle bien des richesses en son sein.

Nous planons vers le fond. La pression augmente régulièrement et notre vitesse s'accélère. Les microscopiques particules de plancton défilent de plus en plus rapidement. La lumière décroit. Nous perdons de vue le miroir inversé de la surface. Le bleu devient dense presque dur. Pendant un temps incertain, nous naviguons entre deux mondes, celui du haut et celui du bas. Enfin, quelques zones claires apparaissent furtivement puis prennent de la consistance. Le fond est atteint, mettant fin à notre longue glissade.

Nous sommes au sommet d'un immense sec tapissé de Gorgones gigantesques ou le pourpre essaye de dominer le jaune. Entre les pieds des hautes Gorgones, des cavités perforent les flancs et le sol du géant, abritant la vie, exubérante, foisonnante. Dans cette forêt pourpre et dense des Anthias lentement circulent se tenant bien à l'abri des ramifications. En regardant dans le bleu, nous apercevons quelques Sars à tête noire. 

Nous descendons le long de la paroi verticale et tourmentée ou le jaune domine sur l'orange et sur laquelle s'accroche perpendiculairement d'autres Gorgones à la ramure imposante. Un beau Serran chèvre passe lentement le museau pointant vers le fond. À flanc de paroi nous prenons grand soin a ne pas toucher les frondaisons. Certaines zones sont très denses en Gorgones. Nous arrivons devant l'entrée d'un canyon, mais un rideau de Gorgones nous empêche de passer. 

À chaque niveau de profondeur correspond un paysage. Le relief tourmenté cède soudain la place au fond sableux puis jaillissant de la nuit sous-marine un nouveau piton, nimbé par un nuage de Bogues, se matérialise. Nous allons de relief en relief au gré de notre fantaisie, subjugué par l'immensité du site. Dans une cavité traversante, des Sars à tête noire et des Anthias se tiennent à l'abri.

Nous remontons lentement le long du mur vertical pour atteindre le sommet ou un nuage d'Anthias et de Bogues tourne. Il est temps de songer à rejoindre notre premier Palier. Nous nous arrachons lentement du fond avec regret.