Octobre 2023

Le début de l'automne dans le midi est pour certains la saison du champignon. Pour les plongeurs, c'est l'apparition du courant Liguro-provencal et ses eaux chaudes sur toute la colonne d'eau. À chacun ses références ! Après une belle navigation où ciel et mer sont en accord et ou chacun prend la mesure de la beauté du paysage, nous nous préparons pour une longue exploration sur un sec baptisée le Jean-Claude du prénom de son découvreur.

Plouf ! Quelques coups de palmes pour amorcer la descente puis, c'est notre ami Archimède qui nous prend en charge. Notre vitesse s'accélère progressivement. Tels des parachutistes en chute libre, nous gérons la vitesse en modifiant notre position. Le temps de descente est plus ou moins long en fonction de la profondeur à atteindre. Le sommet du sec apparait progressivement sortant des ténèbres bleutées. Une forêt de Gorgones pourpres aux extrémités jaunes comme une chevelure de style punk le recouvre. Des Bogues argentés et des Anthias roses tourbillonnent autour dans le long faisceau blanc des lampes de plongée. Après le bleu de velours intense, presque noir des derniers mètres, c'est une explosion de couleurs qui ravit l'oeil de l'aquanaute.

Nous suivons le flanc du relief en direction du sol qui est encore loin en dessous de nous. Un Serran chèvre essaye d'imiter un fakir sur sa planche à clous. Les pointes métalliques étant plutôt rare sous l'eau, ainsi que les planches, il les a simplement remplacées par un Oursin melon qu'il domine sans pour autant se poser dessus. Très digne, il regarde fixement la caméra hésitant à commencer le spectacle. En contrebas, un banc de Bogues passe rapidement et disparait dans le noir après avoir survolé dans une belle trajectoire courbe des Gorgones pourpres ourlées de jaune.

Siu-Kwan, qui est devant moi, filme au milieu d'un buisson de Gorgones un Chapon habitant emblématique des fonds méditerranéen. Celui-ci reste impassible devant le paparazzi subaquatique. Nous arrivons sur un substrat de sable grossier au pied du sec. C'est ce type de lieu que les Oursins lances rouges affectionnent particulièrement. Par centaines ils sont présent de la base du relief jusque là ou notre regard peut porter. Notre apprenti fakir devrait venir ici pour roder sa technique.

Après une bande de sable en forme de dos d'âne un autre relief moins haut et plus incurvé se dessine. Nous prenons sa direction. Devant lui un banc d'Anthias tout en longueur se déplace. Ma compagne de Palanquée émet des cris sourds et répétitifs pour attirer mon attention. Je me retourne et découvre dans le halo de sa lampe une Baudroie. Elle est posée sur le sable sur lequel elle se fond visuellement. Championne du mimétisme, elle est capable de happer goulument un poisson inconscient du danger qui oserait passer trop près d'elle. Elle nous laisse filmer quelques plans puis, sans doute vexée d'avoir été découverte et lasser par notre présence, elle décolle du fond et s'éloigne pour trouver un autre terrain de chasse.

Nous visitons rapidement la roche que nous avons rejoint puis nous faisons demi-tour pour revenir sur le sec principal. Un Gorgonocéphale posé au sommet d'une petite Gorgone est au repos, ses dix bras enchevêtrés sous lui. Un Serran chèvre vient parader devant l'objectif. Puis nous croisons la Palanquée de Jean-Claude qui pousse vers nous un banc d'Anthias. Derrière eux quelques Sars à tête noire. Un Oursin melon accroché à la falaise fait bon ménage avec une Holoturie posée sur une corniche sableuse au-dessus de nous.

Nous avons atteint notre temps maximum au fond. La remontée commence non sans avoir gonflé notre Parachute de signalisation. Nous retraversons dans l'autre sens le banc de Bogues qui nous a reçus à notre arrivée pour rejoindre nos Paliers. Le Jean-Claude disparait à nos yeux jusqu'à une prochaine plongée.