Juillet 2023

Nous partons aujourd'hui, sans le savoir, à la rencontre d'un chapitre de l'histoire de la plongée. Matériel déposé à bord, nous débouquons le canal du Roubaud laissant le port de l'Ayguade derrière nous, direction de large. Le temps est splendide, la mer plate et lisse comme un miroir, le ciel sans nuages. Très rapidement, nous arrivons sur le lieu de notre immersion. Nous partons en première Palanquée en direction des abysses.

La descente dans le bleu est toujours un moment intense, une coupure entre deux mondes. Nous arrivons sur un fond sablo-vaseux propice à la vie. Bien sûr d'aucuns vous diront que sur le sable il n'y a rien ou pas grand-chose et que c'est une perte de temps que d'explorer ce biotope très particulier. En effet, il y a une densité d'organisme moindre du moins au premier abord, mais si vous êtes attentif, vous accédez alors à un autre univers.

Dès notre arrivée, nous nous trouvons en présence d'un banc de poissons long, fin et argenté, très vif. C'est peut-être des Lançons Cicerelle, espèce de lançons présente uniquement en méditerranée. Devant nous à perte de vue un fond uniformément plat recouvert par des algues assez longues et verte. De temps en temps, une zone caillouteuse et nue ponctue ce paysage sous-marin.

Nous nous avançons légèrement au-dessus du fond, en apesanteur, dans le sens du léger courant. Une belle Sabelle, elle aussi inclinée dans le sens du courant, oscille lentement. Devant un trou de 15 à 20 centimètres de profondeur entouré d'un cône de débris variés, étalé de tout son long, un Poulpe nous regarde sans broncher. Sa peau qui recèle des millions de cellules colorées est couverte de taches, de petites cornes et autres pustules. C'est peut être un signal pour nous signifier que nous le dérangeons.

Un deuxième banc de Cicerelles se lève devant nous et "s'envole" telle une nuée d'étourneaux. Un second Poulpe a élu domicile à environ deux mètres du premier. Ce n'est pas commun, les Poulpes étant plutôt solitaires. Celui-ci est plus lisse que le précédant et de couleur crème. Comme le premier, il nous observe avec l'oeil d'un vieux sage, mais ne réagit pas à notre approche. Nous continuons notre déambulation palmée et découvrons un magnifique Grand Cérianthe, ses tentacules fortement urticants, sont déployés en couronne à la recherche de nourriture.

Encore un Poulpe. Cette fois nous nous regardons, avec ma compagne de plongée, assez interloqués. Nous remontons un petit peu pour englober un paysage plus large. Nous découvrons alors d'autres trous de Poulpe dans toutes les directions. Ils sont espacés, les uns des autres, de un à deux mètres et sont tous occupés. Me revient alors en mémoire le livre de Cousteau, le Monde du Silence, qui parle d'un village de Poulpe sur un fond de vase plat, près de Porquerolles. Avons-nous découvert ce village ? C'est peu probable, car la durée de vie du Poulpe est courte et le livre retrace des péripéties datant de plus de soixante-dix ans.

Continuons notre voyage sous-marin pour aller visiter les différents céphalopodes. En chemin nous croisons un Syngnathe, sorte d'Hippocampe déroulé. Il a tellement confiance en son mimétisme avec l'environnement qu'il se laisse filmé de très près sans prendre la fuite. Un Grand Hydraire plumeux profond, tout échevelé est recouvert de particule lui donnant un aspect sale, négligé.

Nous arrivons maintenant sur notre quatrième Poulpe. Celui-ci ressemble à un diablotin. Il a deux cornes au-dessus des yeux dressés comme les ailes du casque d'Astérix. C'est décidément, la fête aujourd'hui, car nous apercevons encore un banc de Cicerelles. Y a-t-il un rapport entre la présence des Poulpes et les nombreuses Cicerelles ?

Au final, nous croiserons plus de dix Poulpes, sans avoir eu le temps de parcourir l'ensemble de la surface où ils sont présents.