Janvier 2023

La descente est rapide tant la profondeur est faible à cet endroit. Le fond qui nous accueille est une vaste prairie de Posidonies dont les feuilles oscillent lentement au grès du va-et-vient de la légère houle de surface. Nous nous stabilisons pour relever un cap au compas. Nord-Ouest, c'est la direction à prendre afin de rejoindre quelques roches éparses invisibles pour l'instant. Nous survolons en rase-motte la Posidonie qui défile sous notre masque. À perte de vue, l'herbier recouvre le substrat. Les longues feuilles vertes piquetées de blanc, en forme de ruban, très dense, commencent à se recouvrir de brun. À notre approche, des Crénilabres paon plongent afin d’être à l’abri au milieu de la végétation.

Soudain, la Posidonie, sans signe avant-coureur, fait place au sable. La frontière entre les deux biotopes est brutale. C'est un nouveau monde qui s'ouvre devant nous. L'étendue sableuse est recouverte en partie par les longs rubans morts issus de l'herbier. Le sable est grossier, granuleux, idéal pour servir de lieu de vie à une multitude d'organismes. Cet espace semble bien vide, mais ce n'est qu'un leurre. À quelques mètres de la forêt, un Poulpe juvénile à découvert essaye de se dissimuler. Il se glisse, maladroitement, sous un des rubans bruns, espérant ainsi devenir invisible à nos yeux. Peine perdue ! Une Étoile de mer rouge évolue avec lenteur et dignité à la recherche de nourriture. Un Serran chèvre vient vers nous très curieux.

Recouvert, en partie par des feuilles de Posidonie, un Oursin granuleux est chevauché par un Doris géant. Celui-ci ne semble pas gêné par les pointes acérées de son partenaire. Ce couple improbable est digne d’une prise de vue. Nous continuons lentement notre progression vers les roches qui sont toujours hors de vue. Sur notre droite, une petite Sabelle déploie son panache afin de capter sa pitance.

Enfin, dans le lointain, une forme sombre et bleutée émerge du sol. C'est notre première destination. Entre nous et le relief, quelques Girelles tournoient au-dessus d'un restant d'herbier anémique. Nous remontons le long des flancs du monticule en direction d'un gros Spirographe qui a élu domicile au sommet afin de mieux capter les particules alimentaires à la dérive. À notre approche, il se rétracte brutalement dans son long tube. Son panache dépasse maintenant légèrement du tube dans lequel loge cet étonnant animal. Derrière lui, un banc de Castagnoles évolue gracieusement dans le bleu azur.

Nous redescendons le long du versant opposé. Sur les flancs du relief, une Bourse de mer duveteuse est en partie recouverte par des particules. Arrivés au sable, nous observons une Galathée bicolore toute de rouge vêtue qui recule lentement puis d’un coup sec de son abdomen fait un bond prodigieux vers la plus proche anfractuosité. La roche, a cet endroit, est colonisée en partie par des Éponges rognons.

Nous nous éloignons sur le sable laissant derrière nous le relief en direction d'une bouée d'amarrage qui doit être quelque part par là. En chemin, nous croisons une énorme Araignée fièrement dressée sur ses pattes qui nous regarde approcher. Elle recule lentement n'hésitant pas à nous menacer de ses pinces. Le rapport de force n'est pourtant pas en sa faveur. Quel courage ! Une très belle Anémone verte se laisse bercer par la houle. Ses longs tentacules verts et souples sont terminés par une pointe de fuchsia très agréable à l'oeil.

Le câble qui relie le fond à la bouée fait son apparition légèrement sur notre droite. Nous le remontons pour atteindre notre Palier. En levant la tête, nous avons la surprise de voir un ballet très vif de Poissons-pilotes tournant inlassablement sous celle-ci. Le groupe doit la percevoir comme un compagnon de voyage potentiel.