Avril 2023

C'est une météo pour plongeur qui nous accueille sur le plan d'eau. Le ciel est bleu, parcouru par quelques cirrus, la mer est plate, l'air est tiède. Un léger zéphyr parcourt l'étendue liquide. Les premières feuilles, d'un beau vert tendre, garnissent les arbres. Les prémices de la belle saison sont enfin là. Dans un ronronnement lancinant, le moteur entraine l'hélice et nous propulse vers notre prochaine expérience sous-marine.

Nous entamons la descente dans une eau toujours fraîche et aussi bleue que le ciel. Arrivés sur le sable, nous sommes accueillis par un spectacle de toute beauté digne d'un tableau peint par un grand maître classique de la renaissance. Imaginez, sur une toile de fond infiniment bleu, délicatement posée sur le sable, une petite roche sombre surplombé fièrement par un grand Spirographe panache branchial au vent. Sur le tube contenant l'animal, à mi-hauteur, des Oeufs de Calmar dans leur gaine blanche. Sur la gauche, a ses pieds, deux Ascidies rouges semblent monter la garde. Devant, à droite du Spirographe, une belle Éponge balle orange ajoute une note de gaité à la scène. La ligne de crête de la roche est recouverte d'une chevelure d'algues vertes hirsutes.

Quelques mètres plus loin, nous rencontrons une Raie torpille. Elle repose sur le fond, légèrement recouverte par quelques grains de sable épars. Nous la contournons. Elle soulève sa queue pour nous signifier qu’elle nous a vus. Un petit buisson solitaire de Posidonies accueille des cocons blanchâtres, sûrement une espèce d'Ascidie coloniale (Remerciements à Monsieur Pierre Chelvadonné * pour son aide à l'identification de cette espèce.)

Nous nous déplaçons au grès de notre fantaisie, sans destination particulière, en ayant pour seul objectif la rencontre avec le monde sous-marin. Une Éponge à cratères, d'un beau rose pimpant, recouvre plusieurs mètres carrés d'une roche arrondie sortant à peine du fond. Deux Ascidies à la tunique cartilagineuse et épaisse d'un noir soutenu sont ses voisines immédiates. Un Oursin diadème a élu domicile plus loin. Ses longs piquants striés oscillent lentement.

Une Ascidie rouge sombre filtre tranquillement l'eau. Sa peau ressemble à la texture d'un cuir granuleux. Encore quelques coups de palmes et là nous tombons par hasard et pour la première fois de notre vie de plongeur sur un spectacle unique. Sur le sable, deux Roussettes sont en train de s'accoupler. Le mâle, perpendiculaire à la femelle, entoure le corps de celle-ci complètement. La femelle posée sur le fond à la queue redressée. Après avoir tourné quelques plans sous tous les angles, nous nous retirons discrètement, sur la pointe des palmes, afin de ne pas les déranger plus que de raison.

Nous observons maintenant une Ascidie blanche en compagnie d'un Grand Cérianthe. Grâce à la magie de la macro, nous pouvons voir la couronne de tentacules sensoriels qui bordent le siphon buccal. Par contraction, l'Ascidie est capable de boucher l'entrée aux objets aspirés s’ils sont de trop grande taille. Éponge balle orange et Oursin granuleux sont nos prochains sujets d'observation. Il est important pour le plongeur naturaliste de prendre son temps pour observer. Notre temps n'est pas celui des organismes marins. Dans un trou, un Poulpe au regard sombre nous observe d'un oeil inquisiteur. Soudain, il prend la fuite ne nous trouvant pas à son goût.

Il est temps de regagner la surface et d'effectuer les indispensables Paliers. Indispensable physiologiquement, mais aussi, pour ancrer nos souvenirs avant le retour à la vie terrestre.