Une très belle journée en ce début mai nous incite à aller plonger sur une petite épave moderne, le Maroupa. C'est une plongée facile, mais qui nécessite d'être peu nombreux, car la visibilité se dégrade très vite sur ce fond sablo-vaseux. Cela tombe bien, car nous ne serons que deux à descendre.
Siu-Kwan : Comme à mes habitudes, un dernier coup d’oeil à mon équipement, surtout vérifier si ma lampe est bien mousquetonnée à l'une de mes sangles et plouf bascule en arrière.
Jean-Luc : Nous voilà en route pour une nouvelle aventure subaquatique dans un nuage de bulles. La descente est rapide, la visibilité moyenne. Nous touchons le sable à côté des restes du Maroupa. Il est dit sur plusieurs sites que cette plongée n'est pas intéressante. Hé bien, détrompez-vous ! Sous réserve de n'être que deux, vous pouvez découvrir ici un concentré de vie subaquatique au milieu d'un désert de sable. Désert tout relatif, car pour qui sait regarder, il y a beaucoup de vie sur le sable.
Siu-Kwan : Nous nous rapprochons de la petite épave foisonnante de vie.
Un réservoir accueille un troupeau de Rouget-barbet disposé en rangs serrés, tête vers l'extérieur, qui s'égaille en tous sens à notre approche.
Jean-Luc : Notre seconde rencontre a lieu avec une Mostelle sur le côté bâbord. Elle a une blessure horrible. Un gros morceau de chair lui manque près de la nageoire caudale.
Siu-Kwan : Oh là là, une Mostelle blessée, bien qu'elle n’émet aucun cri elle doit souffrir. Que vois-je sous la tôle ? Un Homard imposant vêtu de couleurs chatoyantes. Il nous observe avec assurance. A maintes occasions, je constate que les habitants sous-marins sont aussi curieux de nous que nous le sommes d'eux.
Jean-Luc : Un Homard s'avance résolument vers nous, dans un bruit de carapace, en émettant un grognement sourd (audible dans la vidéo à 56"). Il vient au contact puis recule. Est-ce lui qui a attaqué la Mostelle ?
Sur un reste de coque, une grappe d'œufs de poulpe oscille. Plus loin, un énorme Chapon nous tourne le dos. Au-dessus de lui, sa copie conforme, mais en plus petite, redresse ses épines dorsales. Une autre Mostelle vient à notre rencontre puis nous tourne le dos dédaigneusement. Dans un trou, une langouste émet son cri d'alerte à notre approche (audible dans la vidéo à 1'37").
Nous traversons l'épave dans sa largeur en poussant devant nous des Anthias. Sur le côté tribord, quelques Castagnoles noires tournent en rond.
Siu-Kwan : Les congres bien dodus accaparent toutes les cavités, ils ont souvent les langoustes comme voisines.
Jean-Luc : Un congre, lové sans son trou, nous observe d'un oeil attentif. À l'étage au-dessus, une autre langouste nous sonde avec ses antennes en émettant un crissement (audible dans la vidéo à 2'06"). C'est notre jour de chance, car nous tombons nez à nez avec un second homard, sous la coque vers la proue.
Posés sur le sable, des Rougets-Barbets partent à notre approche. Dans le bleu, des Mendoles se déplacent en tous sens.
Siu-Kwan : Comme le temps file rapidement sous l’eau ! J’entame ma remontée avec une sensation d’harmonie de l’esprit et du corps. Encore et toujours je range cette plongée parmi tant autres dans les petits tiroirs de ma mémoire.
Jean-Luc : Un dernier survol du bloc moteur et nous amorçons notre remontée vers les paliers. Après avoir envoyé un parachute, nous attendons que le bateau d'assistance nous mette en place un "pendeur" auquel nous nous accrochons. Pour freiner le déplacement du bateau et éviter de nous trainer derrière, une ancre flottante est immergée. Deux petits alevins tournent autour.
Il n'a pas froid aux yeux et ses pinces sont très puissantes. Attention à vos doigts.
Clic, crr, trap, bzz, on entend sous l’eau toutes sortes de petits bruits émis par les animaux marins. Le monde sous-marin est loin d’être le monde du silence. Quant au homard, il peut être aussi bavard que les langoustes. Pour se faire, ils contractent ses muscles situés à l’intérieur de sa carapace. Cela produit un son de basse fréquence, comme un bourdonnement, audible, dans cette vidéo, à 56" et 2'10".
Le Homard est une espèce de fonds rocheux ou sableux, mais il est aussi présent dans les épaves. En Méditerranée, on le voit souvent à partir de 30 m et jusqu’à une centaine de mètres de profondeur. Sa taille, entre 25 et 50 cm peut atteindre 60 cm sans les pinces pour un poids de 8 kg. L'espérance de vie du homard est de 15 à 20 ans.
Le mâle a de plus grosses pinces que les femelles, par contre son corps est plus fin. Les deux pinces ont une fonction différente : la plus fine sert à découper. On l’appelle le ciseau. L’autre, la plus épaisse, s’appelle le marteau. Elle sert à écraser et à broyer les coquilles.
Il est omnivore et chasse la nuit. Il se nourrit de tout animal qu’il peut capturer et ses pinces, très puissantes, peuvent sectionner le doigt d’un homme, l’un de ses rares prédateurs est le poulpe.
Il vit en solitaire et est territorial. Il accepte d’être entouré de ses congénères uniquement pendant la période de reproduction. Il doit changer sa carapace à mesure qu’il grandit. La mue a lieu 4 à 5 fois durant sa première année de vie puis une fois par an lorsqu’il est adulte.
Il est ovipare. Après l'accouplement, le couple peut partager le même trou pendant quelques jours, au bout desquels ils se séparent. La femelle pond jusqu'à 100 000 œufs au cours de sa vie. Elle les "couve" plusieurs mois sous son abdomen avant leur éclosion.
L'éclosion a lieu au printemps et en été. Chaque nuit, pendant 2 à 6 semaines, les femelles libèrent leurs larves dans le milieu marin. Pendant un mois, les larves nagent en pleine eau (phase nageuse) et subissent quatre mues. Lors de la dernière, elles adoptent la forme et le comportement de petits homards, et s'établissent sur le fond.
Cette épave est en réalité d'origine inconnue. Elle est dénommée le Maroupa et est supposée être le bateau de Charles Aznavour d'où son second nom l'Aznavour.
Le bateau de Charles Aznavour ?
La seule chose qu'il est possible de dire, avec certitude, est que Charles Aznavour a été pris en photo
sur un Royal Cruiser III (photo ci-dessus) de la marque Storebro
le 19 août 1967 en rade de Villefranche-sur-Mer. Il est indiqué sur le site du fabricant : "A prominent owner of Royal Cruiser III was the French songwriter Charles Aznavour, who bought a Royal Cruiser III in 1968. Unfortunately, his ship was driven from the anchorage to the rocky coast in a storm and severely damaged."
"Un éminent propriétaire du Royal Cruiser III était le chansonnier français Charles Aznavour, qui a acheté un Royal Cruiser III en 1968. Malheureusement, son navire a ripé du mouillage puis a été drossé sur une côte rocheuse dans une tempête et a été gravement endommagé."
Pour être complet, il existe une autre photo
qui montre Charles Aznavour devant l'épave d'un bateau nommé "Nouchka" le 7 aout 1972 avec comme titre : "French singer Charles Aznavour and his yacht "Nouchka" after the explosion." et comme légende : "Charles Aznavour looking at the remains of his yacht "Nouchka" after the explosion that occured on board. The french singer was onboard with his secretary Levon-Sayon and both had only few minutes to jump into the sea, 7th August 1972. (Photo by James Andanson/Sygma via Getty Images)"
"Le chanteur français Charles Aznavour et son yacht "Nouchka" après l'explosion
Charles Aznavour regarde les restes de son yacht "Nouchka" après l'explosion qui s'est produite à bord. Le chanteur français était à bord avec son secrétaire Levon-Sayon et tous deux n'ont eu que quelques minutes pour se jeter à la mer, le 7 août 1972. (Photo par James Andanson / Sygma via Getty Images)"
Il y a, en fin de compte, de très nombreuses questions sans réponse :
1 - Sur le site du constructeur, le bateau a été endommagé gravement. A-t-il été réparé ?
2 - Est-ce le même qui a explosé en 1972 ? Si oui ce n'est donc pas le Maroupa.
3 - Charles Aznavour a-t-il eu d'autres bateaux ?
Le bateau de 1967 a les caractéristiques suivantes :
Année de production 1965-1968
Longueur (m) 9.06
Largeur (m) 3.11
Tirant d'eau (m) 0.75
Hauteur au-dessus de la flottaison (m) 3.10
Déplacement (t) 3.50
Carburant (l) 2 x 200 (-1967)
2 x 300 (1967-)
Eau (l) 125
Ce qui est proche des dimensions du Maroupa.
L'épave abrite un bon nombre de Congres, Chapons, Homards, Mostelles.
Quelques restes de filets sont accrochés le long de son restant de coque. L’intérêt est le moteur et les parties métalliques. La coque a disparu, il ne reste plus que la partie enfouie dans le sable.
Sur un fond de sable, perdu dans l'immensité, git une petite épave. Le Maroupa, dont il ne reste plus qu'un fond de coque, nous attend...
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