Seul ! Seul sur une épave habituellement très fréquentée, c'est le privilège que nous avons pour cette première plongée de l'année 2022. Profitons de l'occasion pour la redécouvrir le plus complètement possible. Lorsque nous arrivons sur la bouée qui signale l'épave du Grec, nous constatons que le courant est totalement absent en surface. Espérons qu'il en sera de même au fond. Saut droit et la descente commence le long du bout qui relie la bouée de surface à l'épave.
Nous arrivons sur le pont, à la hauteur d'un gros treuil figé à jamais par les concrétions, sans rencontrer le moindre courant. C'est les conditions idéales pour faire dans la même plongée les deux parties du Grec. En quelques coups de palmes, nous traversons le pont pour rejoindre le côté bâbord. Nous passons par-dessus le bastingage pour longer la coursive bâbord de l'extérieur afin de ne pas endommager les Gorgones rouges. Les superstructures, dont le toit a disparu depuis longtemps, laissent passer la faible lumière venant de la surface. Nous amorçons notre descente vers le sable en compagnie d'un Sar tête noire et d'une bande d'Anthias. Sur le sable une Mostelle survoltée nous attend. Elle nage en rond devant son repaire. Un bref regard vers le haut nous permet de visualiser la silhouette fantomatique du bateau.
Direction la cassure ou les tôles déchiquetées le 3 décembre 1945 par la violente explosion de la mine sont habillées par les restes d'un filet qui achève ici son existence. En survolant le paysage lunaire, légèrement ondulé, constitué de sable, nous prenons la direction de la partie avant. Celle-ci, progressivement, se découpe devant nous sur le bleu infini des fonds marins. D'abord silhouette sombre et bleutée, elle révèle à notre approche tous ses détails. Anthias, Girelles, et Mérous sont les locataires de cet endroit. Les concrétions recouvrent le métal dans une débauche de couleurs. L'énorme treuil avant est toujours à poste malgré l'impressionnante inclinaison du pont. Nous survolons l'étrave pour rejoindre la faille située sur tribord. Là aussi un filet déchiqueté termine son existence.
Après avoir fait le tour de la partie avant, nous revenons vers l'arrière en compagnie d'une petite Raie torpille qui nous ouvre le chemin. Depuis un mois environ nous croisons régulièrement des Raies torpille. Est-ce un hasard où une période propice ? Nous n'avons pas la réponse. La partie arrière fait à nouveau son apparition. Nous rejoignons la cassure puis le pont et enfin le bout qui remonte vers la surface. C'est maintenant la lente remontée pour faire nos paliers où nous sommes attendus par une Salpe.
Construit en 1912 par les chantiers navals Dundee SB ltd, le Sagona était un petit cargo de 54 m de long et de 8,5 m de large jaugeant 808 tonnes. Il disposait d'une machine à vapeur de 98 ch. Sa vitesse de pointe était de 11 nœuds.
Immatriculé à Londres, il est transféré à Saint-Jean de Terre-Neuve où il est intégré dans un service de caboteurs relié au réseau ferroviaire de l'île. Il changera de propriétaire et de fonctions plusieurs fois au cours de sa paisible carrière. Il a notamment été utilisé pour des campagnes de chasse au phoque de printemps en 1923. En 1941, il est vendu à la Colliford Clarke Company de Londres puis à une société grecque, la Zaratti S.S. Co, basée à Panama.
Son surnom "Le Grec" vient du fait qu'au moment du naufrage, l'équipage et les papiers du navire étaient de cette nationalité.
Naufrage
Le 3 décembre 1945, chargé de vin, comme le Donator, le Sagona se présente entre les îles de Port-Cros et de Porquerolles. Le mistral est fort et le navire longe la côte sud de l'île de Porquerolles. La zone n'est pas complètement dégagée des mines de la dernière guerre. Il heurte une mine du côté bâbord et coule immédiatement, tuant deux hommes et faisant un disparu. Le reste de l'équipage est pris en charge par les bateaux qui viennent à leur secours.
En ce lendemain de réveillon du Nouvel An, l'humidité nous transperce pendant que nous faisons route vers l'épave du Grec. Le temps est maussade, le soleil absent. Le ciel tourmenté est d'un gris sombre au bord de la dépression tant il semble toucher la mer qui reflète sa couleur.
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