La pénombre bleutée nous aspire. La pression augmente aussi vite que la lumière diminue. La descente dans le bleu parait sans fin. Les particules défilent devant la vitre du masque. Après une descente vertigineuse, dans le faisceau étroit de nos lampes, apparait d'abord indistinctement, puis de plus en plus nettement, le sommet du cap d'Armes.
Dominique, Siu-Kwan et moi continuons notre descente le long des flancs de la montagne sous-marine pour atteindre le sable à sa base. Là, un Pleurobranche tortue est délicatement posé. Nous avons de la chance, car, juste à côté de lui, d'une blancheur immaculée et relativement rare, sa ponte, sous la forme d'un ruban filandreux, est accrochée au substrat. À quelques distances, au-dessus, sur le Coralligène pourpre, un petit Chapon, revêtu de sa tunique orange avec des taches blanches, patiente en attendant qu'une proie passe à sa portée. De délicates Salmacines sont accrochées aux Gorgones charnues. Nous survolons à présent une zone où Gorgones et Gorgonocéphales cohabitent. Les Anthias peuplent cette solitude sous-marine et animent le paysage.
Entre les Gorgones, des Éponges cavernicoles jaunes côtoient des Ascidies rouges. Comme sur beaucoup de plongées, des fils de nylon abandonnés sont emmêlés dans les branches des délicates Gorgones. Impossible de les retirer sans briser les fines ramures. La densité des Anthias est impressionnante. Dans certaines zones, il sont des milliers à virevolter en tous sens.
Coincée entre du Parazoanthus et le pied d'une Gorgone, une Holoturie noire piquetée de points blancs prend ses aises. À ses côtés, légèrement en surplomb, quelques délicates et minuscules Dentelles de Neptune essayent de s'épanouir au milieu des Éponges cavernicoles jaunes. Nous continuons, quelques minutes encore, notre avancée en remontant progressivement le long des flancs abrupts.
Le temps nous est compté. Nous devons à présent rejoindre le premier palier. À cette saison, il est courant d'y observer du gros plancton à la dérive. Au bout de quelques minutes, en effet, nous apercevons une Ceinture de vénus au corps parcouru d'éclat lumineux qui ondule lentement au grès de sa dérive. Nous remontons au palier suivant ou nous sommes attendus par une Leucothéa, qui tel un vaisseau intersidéral bio-luminescent, lance des éclairs dans le bleu méditerranéen.
Après ces beaux paliers, nous perçons la surface ou le semi-rigide de PlongeeO nous attends.
Lorsque vous apercevez une masse gélatineuse, informe, surmontée de protubérances pyramidales qui rappelle, un peu, le dessert anglais appelé "Jelly" vous êtes en présence d'un Pleurobranche tortue.
Le Pleurobranche-tortue est, en fait, une limace sans coquille. Avec ses 20 cm, c'est l'un des plus gros pleurobranches de Méditerranée. Sa couleur varie, de l'orange au pourpre en passant par le marron violacé. Il parait vulnérable face à un prédateur, mais il se protège grâce à un mucus qui le recouvre. Cette protection contient un alcool, le Testudinariol. Cette substance est une toxine pour les poissons.
Ascidies et éponges sont sa nourriture de base. Il a pour habitat les fonds sableux à grosse granulométrie.
Il est mâle et femelle, simultanément. Pour se reproduire, il doit se mettre tête-bêche avec son partenaire, car ses organes génitaux, mâles et femelles, fonctionnels en même temps, sont sur le côté droit proche de la branchie.
Sa ponte ressemble à un ruban blanc filandreux.
C'est une des plus fameuses plongées de la région ! Située devant le cap d'Armes, face au grand large, elle offre un paysage démesuré et contrasté ou pics rocheux gigantesques et plages de sable cohabitent avec les très nombreux Anthias, Gorgones et Gorgonocéphales. La lumière du jour se fait lointaine, la pression augmente au fur et à mesure de la descente, le bleu est plus dense, bienvenue sur le cap d'Armes.
Lors d'une plongée hivernale, un des membres de notre équipe s'est retrouvé en très fâcheuse posture à cause des fils de nylon abandonnés. Pendant la remontée, à 30 mètres de la surface, en pleine eau, il laisse filer le dévidoir de son parachute de signalisation. Lorsque celui-ci est complètement déroulé, il gonfle son parachute pour l'envoyer vers la surface. Le parachute amorce sa remontée, d'abord lentement, puis la pression diminuant, de plus en plus rapidement. Le bout (fil qui relie le dévidoir au parachute) défile devant le plongeur. En baissant la tête, celui-ci aperçoit le dévidoir qui remonte de plus en plus vide tractant derrière lui une véritable pelote de fil de nylon. Le temps d'un battement de paupière et voilà le dévidoir et la pelote de nylon à la hauteur du plongeur. Le fil de nylon s'enroule autour de lui le ligotant à 30 mètres de fond en pleine remontée. Pour le second plongeur, c'est une situation très difficile. Il ne peut s'approcher au risque d'être lui aussi pris. Il se tient donc près à intervenir pour donner de l'air en cas d'arrachage du détendeur. Le plongeur ligoté, grâce à son expérience ne panique pas. En jouant sur l'air de sa combinaison étanche, il arrive à remonter lentement à la hauteur du premier palier mettant en tension le nylon qui est encore solidement arrimé au fond. Après maintes contorsions, il atteint son coupe-fil. En une dizaine de minutes, il se libère en partie du nylon tout en gérant ses paliers. Il finira de retirer les restes du fil de nylon sur le pont du bateau.
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