Après une longue navigation, nous arrivons sur le lieu de notre prochaine immersion quelque part aux confins de notre zone de plongée habituelle. Nous nous équipons pour supporter l'eau à 13° pendant plus d'une heure. Dernières vérifications. Nous sautons en direction les fonds marins. Dés que vous brisez la surface, la descente dans le bleu commence. Cette chute est une transition entre le monde terrestre et le monde subaquatique. Moment intense où vous ressentez physiquement l'augmentation de la pression de l'eau sur votre corps et l'apesanteur liquide.
Bulles et particules défilent devant le masque. Le fond apparait finalement, lentement. Une solitude de sable blanc, ondulé à perte de vue, parsemé de petits reliefs coralligène nous accueille. C'est une sensation étrange. Nous sommes seuls au milieu d'un désert liquide à perte de vue.
Le premier des coralligènes, concentre en son sein un véritable festival de vie. Éponges rognons, Ascidies rouges, Diazone blanche, Ascidie noire et tant d'autres ce disputent l'espace et cohabitent en rangs serrés sur ce minuscule îlot perdu dans l'immensité sableuse. Un Serran chèvre et des Anthias tournent inlassablement au-dessus.
Au détour d'un relief, c'est une Langouste qui pointe ses antennes vers la caméra en émettant son crissement d'alerte. Un grand Cérianthe et un Doris dalmatien cohabitent avec un gros Chapon en partie recouvert de Posidonnies mortes. Au loin, des grands Hydraires plumeux profonds vivent en ermite sur le sable.
En quelques coups de palme, nous arrivons sur un autre coralligène, plus petit que le précédent, recouvert de débris de Posidonies que les courants sous-marins ont déposé là. Une Éponge cornée noire est entourée par trois Ascidies de la même couleur. En avançant sur le sable blanc, au pied d'un grand Hydraire plumeux profond, nous découvrons une prairie de Pennatules qui s'étend au-delà du regard. Elles sont capables d'orienter leur corps pour capter au mieux les particules nutritives qui dérivent.
Après la traversée d'un espace sableux, c'est un nouveau coralligène qui accueille un Chapon devant lequel gisent plusieurs tests d'oursins fracassés. Nous continuons notre progression vers un Grand Hydraire plumeux profond isolé sur le sable. Un dernier coralligène et une Pennatule, en transit vers on ne sait quelle destination, coupent notre route.
Chaque plongée a malheureusement une fin. Cette fin peut être décidée par la quantité d'air restant dans la bouteille ou bien la durée des paliers à effectuer ou encore le froid. Nous décollons du fond et amorçons notre remontée en veillant bien à ne pas être dans notre nuage de bulles ce qui indiquerait une ascension trop rapide. Le premier palier est atteint. Nous profitons de ce temps de décompression pour nous refaire dans la tête le film de notre immersion.
Dressée ou couchée tel un phallus humain l'ascidie noire vit revêtu d'un habit cartilagineux épais plus ou moins recouvert de protubérances. À son sommet se trouve une ouverture béante qui est son siphon buccal par lequel elle aspire l'eau. Plus bas, mais beaucoup moins visible, se trouve son siphon cloacal par lequel elle expulse l'eau.
Elle est visible sur différents substrats. Fonds durs, coquillages, pierres, sable ou vase, qu'importe, pour elle tout est bon.
Pour se sustenter, elle filtre les éléments nutritifs en suspension dans l'eau par son siphon buccal. Elle expulse les déchets de sa digestion par le siphon cloacal.
Elle n'a pas que des amis. Petites porcelaines, nudibranches ou étoiles de mer font partie de ses prédateurs.
Sa reproduction est sexuée. Les ovules sont fécondés par les spermatozoïdes et donnent naissance à une larve de 2 à 3 mm en forme de têtard avec un corps globuleux terminé par une queue facilitant la nage. La larve va rapidement se fixer sur un substrat provoquant la disparition de la queue.
MER DE SABLE
Sous un ciel métallique, nous naviguons pour rejoindre une vaste étendue sous-marine désertique et sableuse. Bizarrement, c'est aux confins de ce nulle part, que la vie aquatique prospère sous des formes excentriques et s'offre à la vue des quelques plongeurs qui fréquentent ces lieux reculés.
